01/04/2010

Entretien avec Victor Démé, Villeurbanne juin 2009


À l'occasion de la sortie, très prochaine, du deuxième album du musicien Burkinabé Victor Démé, je poste un petit entretien réalisé avec lui l'an dernier à l'occasion de son passage par Villeurbanne :

Victor Démé a 45 ans. Son parcours l’a promené de son Burkina natal à la Cote d’Ivoire ou il débarque à l’approche des ses 18 ans pour bosser aux cotés de son père couturier comme tout le monde au sein d'une famille de l'ethnie Marka. Il fera alors le bonheur des noctambules de Trechville, le quartier chaud de la capitale Abidjan, notamment aux cotés d’Abdoulaye Diabaté alors leader de l'orchestre Super Mandé. Après un peu moins de trente années passées sur les terres d’Houphouet Boigny il rejoint son pays natal où l’excellent Thomas Sankara vient d’accéder au pouvoir promettant quelques années de stabilité au pays des hommes intègres. Malgré de longues années passées à faire le troubadour aucun album n’est alors à son actif.
C’est en 2005 que le destin va finalement, après pas mal de galères, lui jouer un bon tour. Camille Louvel, globe-trotter mélomane et entrepreneur débrouillard à la tête du récent studio OuagaJungle décide de graver les morceaux de Démé entendu dans un improbable maquis de Bobo-Dioulasso, la deuxième ville du Burkina. La mayonnaise prend et de fil en aiguille l’album fait son chemin jusqu’à la programmation de France Inter. 40 000 albums vendus et le prix Radio France plus tard, nous l’avons rencontré en marge d’un concert à Villeurbanne.

Si tu devais faire une petite analyse des deux années qui viennent de passer qu’est-ce qui te viendrait à l’esprit ?

« Hé bien, ça va bien. Je ne m’attendais pas à ça, franchement c’est balaise pour moi. Ça m’a dépassé mais néanmoins je crois que cela a changé ma vie. J’ai rencontré pas mal de gens grâce à cette tournée, beaucoup que je ne pensais jamais rencontrer. »

Ce soir on est à Lyon, mais vous revenez d’une tournée africaine qui semble-t-il a été assez géniale, notamment et entre autres dates, le retour sur ta terre de Bobo-Dioulasso (Burkina) ?

« Ah oui, je peux dire que le concert de Bobo m’a beaucoup dépassé parce que le stade de l’Amitié était vraiment plein, il ne restait plus une place. J’avoue que j’étais étonné, d’autant qu’à Ouaga (dougou) c’était la même chose. Je crois qu’en Afrique aussi notre musique est respectée, on en a fait le tour et tout s’est bien passé. Je suis très heureux de pouvoir être reconnu dans mon pays. »





Je crois savoir qu’il y a d’autres concerts qui t’ont mis du baume au cœur ?

« Oui, notamment le concert dans la prison de Frênes dans la région parisienne. On a joué pour nos frères qui se trouvent là-bas et ils étaient vraiment très heureux, c’était un concert plein d’émotion. L’ambiance était vraiment balaise. »

Où en est le travail concernant le prochain album ?

« Hé bien on avance bien, pour tout dire c’est même presque fini. Une fois rentré au pays on va essayer de tout mettre en ordre. On enregistre au studio Ouagajungle fondé par Camille (Louvel). C’est là où tout a commencé et ou tout doit finir. On enregistre d’ailleurs avec la même équipe de musiciens. »

Ce soir vous êtes à Villeurbanne, demain à Nice, après-demain à Paris. Comment se passe la rencontre avec le public français ?

« Je dois dire que pour l’instant je suis toujours tombé sur de très bon public en France, et cela m’a permis de faire de nombreuses rencontres. Ce soir (à Villeurbanne) le public était merveilleux, je dois dire que parfois ce succès me dépasse, je ne m’attendais vraiment pas à cela. Tu sais, chez moi je faisais ma musique dans mon coin, je cherchais juste quelqu'un pour m’aider à faire ma cassette et la vendre un peu au Burkina, et me voilà ici… »

Quel conseil donnerais-tu aux jeunes musiciens burkinabais aujourd’hui ?

« Je voudrais leur dire que seul le travail paye. Parce que nous les artistes, nous sommes mal vus dans la société burkinabaise. Il faut dire que souvent certains se comportent bizarrement. Tu sais, la musique n’aime pas l’orgueil. La musique n’aime pas celui qui se gonfle. La musique n’aime pas les jaloux. Si tu joues la musique et que tu es orgueilleux, que tu te crois plus grand que ce que tu es, la musique te détestera. Il n’y a que le travail qui paye et dans un groupe il faut vivre comme dans une famille. Ce n’est pas parce que l’un est plus fort que l’autre qu’il faut se gargariser. Le plus important c’est de bosser, de répéter encore et toujours. C’est cela que j’ai à dire à la jeunesse burkinabaise, qu’il faut bosser et qu’il faut garder à l’esprit nos racines, notre culture qui est très riche.

LIENS INTERNET :
http://www.myspace.com/victordeme
http://www.facebook.com/pages/Victor-Deme/11304658130
http://www.makasound.com/
http://chapablues.com/

(copyright photos, texte, J.S)


(Mr Diarra)

1 commentaire: